Les brouillards de Londres – e07

Harrow, Angleterre, 19 décembre 1877

Miss May

Je vous écris rapidement, car le temps presse. L’instant est grave. Une d’ampleur nationale est à l’œuvre dans notre pays.

Avant de vous expliquer plus avant je tiens à vous remercier d’avoir mis sur ma piste Johnson, Gary, et Macburney afin d’assurer ma protection. Je salue votre intuition concernant cette affaire. 

Je fus agressé et assommé  un soir en rentrant à mon hôtel. Ils étaient nombreux et je n’ai rien pu faire. Mes trois protecteurs n’ont pas eu le temps d’intervenir.  Étant dans l’inconscience je n’ai même pas pu retenir des détails sonores quant au trajet qui me menait vers ma prison.

Une fois réveillé je me retrouvais assis sur une chaise avec une cagoule sur la tête. Un bruit de machine que je ne pus identifier au départ se faisait entendre en permanence. Je pensais être détenu dans une usine ou quelque établissement similaire. Mais mon hôte ne me laissa pas le temps de réfléchir plus avant.

Je reçus quelque coup de pied dans le ventre histoire de me réveiller et d’attirer mon attention.

Puis une discussion avec Monsieur S. est venue discuter poliment avec moi. Ses phrases étaient colorées d’un fin accent hispanique. Ce qui confirma la description que vous me fîtes dans une de votre précédente lettre. Je ne put toutefois confirmer le descriptif de ses traits, car la cagoule resta sur ma tête lors de chacune de nos discussions.

Il ne posa aucune question à vrai dire, ou du moins il ne posa aucune question dont il n’avait pas déjà la réponse. 

Il m’expliqua son intérêt pour lui de m’avoir fait enlevé. Il savait qu’il prenait des risques à intenter à la vie d’un inspecteur de police, mais il affirma mainte fois qu’il y était obligé. J’ai rapidement compris que sa motivation pour récupérer le collier est sans faille. 

Malgré les comportements brutaux de ses sbires, je ne fus jamais molesté plus que de raison. Ils m’ont nourri sans jamais me détacher. Ils prenaient bien soin de ne jamais enlever leur masque sur leur visage à chaque fois qu’ils m’ôtaient leur cagoule. Des masques vénitiens de grande qualité qui juraient avec leur vêtement de mauvais bougre des bas fonds. 

Au final durant les quelques jours de captivité je ne pus déceler aucune information intéressante. Et bien que ma vie était en danger, je priais le ciel pour que vous ne cédiez pas aux pressions de ce malfaiteur.  

Et c’est durant la nuit dernière que mes trois anges gardiens intervinrent. Ce fut rapide, car seuls deux acolytes restaient sur place durant la nuit. Ils furent rapidement arrêtés et maîtrisés. Je fus libéré. Après être sortie de la cave où mes geôliers m’avaient enfermé, je compris rapidement où j’étais. 

Le lieu de ma captivité est une vieille usine de conserves encore en activité. Usine qui appartenait à… feu Lord Mortimer. 

Les malfrats avaient simplement profité des accointances avec la première victime pour installer leur repaire dans cette vieille usine.

l’usine était encore en fonction et les machines produisaient encore des conserves. Une belle couverture pour des quartiers généraux de truands. 

En interrogeant l’un des hommes de S. j’appris rapidement que vous deviez déposer le collier dans une poubelle à Hyde Park. Mais malgré le télégramme envoyé en vitesse à Scotland Yard, les agents arrivèrent trop tard pour arrêter S.  qui a disparu depuis.

Selon le Eduardo, l’acolyte que j’ai pu interroger révéla que S. organisait des vols de bijoux parmi les nobles afin de faire beaucoup d’argent. L’argent servira un grand projet dont Eduardo ignorait la nature. La Noblesse anglaise se fait donc dépouiller de ses richesses pour financer un obscur projet dont même les participants en ignorent la nature. Cela va donc plus loin qu’une simple volonté d’enrichissement personnel. 

Nous avons souhaité tendre un piège à S. en attendant son retour à l’usine de conserve, mais personne ne vint. Il a sûrement été informé de mon télégramme. Il y a peut-être une taupe au sein de Scotland Yard, ce qui expliquerait pourquoi il y a toujours un coup d’avance sur nous.

Eduardo confirma la trahison de Lord Mortimer. S. a en sa possession des documents compromettants sur le passé de Lord Mortimer. Il l’obligea donc à organiser le vol du collier de diamants. Mais Lord Mortimer prit du retard dans la restitution du collier. Nous savons tous les deux pourquoi. S; donna rendez-vous à Mortimer qui, désireux de s’expliquer et de donner de l’argent en échange du collier, se rendit sur les quais en pleine nuit. Là, trois assassins l’attendaient dont Eduardo qui avoua rapidement en échange d’un allègement de peine.  Le meurtre fut rapide et une casquette fut ajoutée dans la main de la victime pour faire croire à une agression de la part d’Henry. Les trois assassins devaient attendre Henry, voler sa casquette et le pousser à l’eau pour enfin appeler la police. Ce qui aurait fait de lui l’assassin désigné. Tout le monde aurait cru qu’il serait tombé à l’eau en agressant Lord Mortimer et la casquette dans la main aurait eu tôt fait de l’inculper. Mais voilà, Henry n’est pas venu et la casquette choisie était trop petite. Un témoin vit le corps de Lord Mortimer flotter et la police arrivant rapidement. Vous connaissez la suite.

Afin de confronter les dires d’Eduardo, j’ai vérifié dans la presse les histoires de vols de bijoux. Mais peu de cas ont été reportés. Je suppose que l’aristocratie britannique n’affiche au grand public l’ensemble des vols dont ils sont victimes. La notoriété d’un Lord serait mise à mal si on apprenait qu’il s’était fait dépouiller. Je ne peux malheureusement me rendre à Scotland Yard pour vérifier les plaintes dans les Dossiers. Avez-vous eu vent de rumeurs de vol de bijoux lors des soirées mondaines?

Je suis maintenant sur la piste de S. Je prends également mes précautions. J’avais sous estimé cette affaire je l’avoue. Désormais je suis toujours accompagné d’une ou deux personnes. Eduardo a révélé une autre cache dans une cave à Harrow, mais elle a rapidement été déménagée.  Des témoins affirment que ne nombreuses personnes allaient et venaient dans cette cave. 

Je n’y ai trouvé aucun indice. Le nettoyage a été fait dans les règles. 

Mais je ne m’avoue pas vaincu je vais poursuivre mon enquête et je finirai bien par trouver une.

De votre côté, vous pourriez prévenir l’ensemble de la haute société que leurs biens sont menacés. Et surtout découvrir qui est la taupe qui informe S. des Fait et geste de Scotland Yard.

Je tiens une fois de plus à vous remercier pour votre brillante et secrète initiative qui me sauva la vie.  Si vous m’en aviez parlé, ma fierté enquêteur m’aurait poussé au refus. Je dois reconnaître que vous être pleine de ressources et qu’il est bon de faire équipe avec vous.

Bien à vous,

Gordon

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